Plagiat – copier le titre d’un ouvrage ou un article : est-ce une contrefaçon?
Dans le monde de la création intellectuelle, la distinction entre plagiat et contrefaçon est cruciale pour protéger les droits des auteurs et des créateurs. Ces termes sont souvent utilisés de manière interchangeable, mais ils désignent des réalités différentes avec des implications juridiques distinctes. Si vous êtes confronté à un cas de plagiat ou de contrefaçon, il est essentiel de consulter un avocat spécialisé en propriété intellectuelle pour défendre vos droits.
Les questions à se poser
Quelle est la différence entre plagiat et contrefaçon ?
Le plagiat et la contrefaçon sont deux concepts distincts mais liés, souvent rencontrés dans les domaines de la propriété intellectuelle et des droits d’auteur :
- Le plagiat est l’acte de prendre les idées, les écrits, les recherches ou les créations d’une autre personne et de les présenter comme les siennes, sans donner de crédit à l’auteur original. En tant que tel le « plagiat » n’a aucune valeur juridique, car ce mot ne fait pas partie du Code de la Propriété Intellectuelle, mais il peut s’agit d’un manquement éthique et académique grave.
- La contrefaçon est une infraction légale plus large qui concerne la violation des droits de propriété intellectuelle. Elle inclut la reproduction, l’utilisation ou la distribution non autorisée d’une œuvre protégée par le droit d’auteur. La contrefaçon peut se produire dans divers contextes, tels que la contrefaçon de marques, la contrefaçon de brevets ou la contrefaçon de droits d’auteur. C’est cette dernière notion qui est souvent assimilée dans l’esprit du public au plagiat.
Pour des détails supplémentaires, vous pouvez consulter l’Article L.111-1 al.1 du Code de la Propriété intellectuelle.
Peut-on protéger le titre de son livre ?
Oui, le titre d’un livre est protégeable par le droit d’auteur, mais il doit présenter un caractère original. En vertu de l’article L.112-4, alinéa 1er du Code de la Propriété Intellectuelle : « Le titre d’une œuvre de l’esprit dès lors qu’il présente un caractère original est protégé comme l’œuvre elle-même ».
Le Professeur Desbois considère que l’originalité se définit comme « toute création qui n’est pas la simple reproduction d’une œuvre existante et qui exprime le goût, l’intelligence et le savoir-faire de son auteur, en d’autres termes, sa personnalité dans la composition et l’expression ».
Comment apprécier l’originalité du titre d’un livre ?
Les Tribunaux estiment qu’une œuvre de l’esprit n’est originale que si elle porte « l’empreinte de la personnalité de l’auteur ». De nombreux titres ont été jugés originaux pour des raisons différentes, exemples : « L’empreinte de l’ange », en ce que ce titre recourt à une métaphore, « Tarzan » ou « Clochemerle » qui sont des créations de toutes pièces. De la même façon, « L’affreux Jojo » ou « Le livre des je t’aime », ont été reconnus originaux du fait de la juxtaposition insolite des termes.
En revanche, les tribunaux ont considéré que des titres comme Parlez-moi d’amour, Les Dames du Lac, Angélique ainsi que les titres constitués de prénoms usuels tels que Louise ou Manon- sont dépourvus d’originalité. Il y a également originalité lorsque le titre est composé d’une association de mots insolites, du moins inhabituelle, ou d’une association de mots antinomiques.
Quels sont les recours envisageables lorsqu’on juge qu’il y a plagiat lors de la sortie d’un livre au titre identique ou proche ?
Même si le titre n’est pas original et ne peut donc pas être protégé par le droit d’auteur, le Code de la Propriété Intellectuelle offre néanmoins une autre possibilité fondée sur le droit de la concurrence déloyale.
Selon l’article L.112-4 al. 2 du Code de la Propriété Intellectuelle, un titre, même non original, ne peut être utilisé sans autorisation « pour individualiser une œuvre du même genre dans des conditions susceptibles de provoquer une confusion ».
Réutiliser le titre -original ou non- d’un ouvrage déjà paru, présente-t-il toujours des risques de poursuite par l’auteur initial ou ses ayants-droit ?
Oui, l’auteur initial/plagié peut invoquer le droit d’auteur si son titre est original, au titre du premier alinéa de l’article L.112-4 du Code de Propriété intellectuelle.
La contrefaçon du titre d’une œuvre est un délit exposant le plagiaire à des sanctions pénales et disciplinaires. Le délit de contrefaçon est constitué au regard de l’article L.335-3 du Code de la propriété intellectuelle en cas de « reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur. » Ce délit de contrefaçon d’ouvrage publié est puni d’une peine maximale de 3 ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende, en vertu de l’article L.335-2 du même code. Des dommages et intérêts peuvent également être prononcés à l’encontre du plagiaire afin de réparer le préjudice économique et moral de l’auteur.
Jurisprudences relatives au plagiat d’un titre d’ouvrage :
- Dans la célèbre affaire du terme “Rififi” utilisé par Auguste Le Breton dans ses titres pour une série de romans, et repris par le titre d’une pièce de théâtre Du rififi dans les labours, la Cour de cassation, par un arrêt du 15 novembre 1989, a jugé : « si Auguste le Breton a vulgarisé l’usage du mot Rififi en l’employant pour composer le titre de plusieurs romans, il l’a toujours utilisé en le combinant avec des noms de lieux et avec des expressions comme chez les hommes ou chez les femmes ; chacun des titres créés par Le Breton constitue un ensemble protégeable, sans qu’il soit possible d’en extraire le mot Rififi dont il ne peut revendiquer la paternité ».
- S’agissant du titre Clochemerle repris ultérieurement par un hôtel-café en guise d’enseigne, la cour d’appel de Lyon, par un arrêt du 5 juillet 1979 a jugé« qu’il est constant qu’avant 1934, date de la publication de l’œuvre de Gabriel Chevalier, le nom de Clochemerle ne figurait dans aucun dictionnaire… De plus, même si l’anecdote de la cloche à merles n’est pas fictive, l’originalité du mot Clochemerle réside dans le rapprochement des mots cloche et merle qui constitue une création de l’esprit ».
- Cette analyse a été reprise à propos du titre Modulor pour un ouvrage à vocation scientifique, repris par l’enseigne Abvent Modulor Studio, la cour d’appel de Bourges ayant également jugé que « Modulor est la contraction des termes module et nombre d’or et s’applique à un système de proportions architecturales breveté en 1945 et fondé sur le nombre d’or ; il s’agissait alors d’une création et correspond en tant que titre d’un ouvrage à une œuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur » (CA Bourges,10 septembre 1996).
- Ont été considérés comme originaux le titre Vol de nuit, dès lors qu’il « n’est pas la reprise d’une expression de la langue courante. Il est original par sa concision et l’association de trois mots sans l’ajout d’adjectif ou d’article évoquant ainsi la solitude du pilote dans la nuit. Il est protégeable… étant souligné que ce titre est désormais associé dans l’esprit du grand public à l’œuvre de Saint-Exupéry » (TGI Nanterre, 29 avril 1998, RDPI, n° 97, mars 1999, p. 27) ou encore le titre Felix the cat, contrefait par le titre Félix le souriceau, dans la mesure où « les termes ‘the cat’ qui suivent le prénom ‘Félix’ contribuent à conférer un caractère original au titre pris dans son ensemble en raison de leur opposition apparente : un prénom d’humain pour désigner un chat. » (TGI Paris (3e ch.), 18 mars 1998, n° 658- III-381).
Comment prévenir le plagiat de son œuvre intellectuelle ?
Le plagiat d’une création originale peut être évité en amont grâce à diverses mesures préventives.
- Tout d’abord, il est recommandé de divulguer publiquement son œuvre dès sa naissance, afin d’établir une preuve de paternité sur celle-ci.
- Ensuite, effectuer un dépôt probatoire auprès d’un organisme compétent comme l’INPI permet de garantir une date certaine à la création de l’œuvre. Cela constitue une preuve solide en cas de litige ultérieur.
- Par ailleurs, avant de partager son œuvre avec des tiers, il est judicieux de leur faire signer un accord de confidentialité. Cet acte peut également servir de preuve en cas de plagiat avéré.
Enfin, pour aller plus loin dans la protection, il est conseillé de consulter un avocat spécialisé en propriété intellectuelle. Ce professionnel pourra prodiguer les meilleurs conseils juridiques pour sécuriser au maximum son travail créatif contre toute usurpation.
Comment les établissements d’enseignement sanctionne le plagiat ?
Les établissements académiques prennent très au sérieux les violations du droit d’auteur par le plagiat. Chacun dispose de son propre règlement intérieur définissant les sanctions applicables, généralement accessible en ligne pour les étudiants et enseignants.
L’exemple d’un avocat ayant perdu son titre : La sévérité des sanctions varie selon l’intention de fraude, la gravité du plagiat et la politique de l’établissement. Mais elles peuvent être extrêmement lourdes, comme l’illustre ce cas d’un avocat ayant plagié lors de sa thèse. En 2023, soit plusieurs années après avoir obtenu son doctorat et son titre d’avocat, il s’est vu retirer ses diplômes par son université. Non seulement son doctorat a été annulé, mais il a également perdu son droit d’exercer la profession d’avocat. L’université est même allée jusqu’à prononcer son exclusion définitive de tous les établissements publics d’enseignement supérieur. Une sanction d’une rare sévérité, qui montre à quel point le plagiat est condamné dans le monde académique. Cet exemple rappelle qu’il ne faut jamais céder à la tentation du plagiat, dont les conséquences peuvent être dévastatrices pour un parcours et une carrière. La meilleure solution reste de toujours citer scrupuleusement ses sources pour éviter tout risque.
Conclusion
En définitive, la protection conférée par le droit d’auteur permet de s’opposer à toute utilisation de titres qui, à défaut d’être identiques, seraient très similaires au titre original. La contrefaçon d’un titre s’apprécie d’après les ressemblances d’ensemble et non sur les différences susceptibles d’exister entre les deux titres, toute reproduction similaire d’un titre original pourra en principe être sanctionnée sur le fondement de la contrefaçon, même lorsque la reproduction n’est pas identique. Toutefois, la prévention est cruciale contre le plagiat. En prenant les dispositions adéquates dès la naissance d’une œuvre, on peut facilement préserver ses droits en cas de tentative de contrefaçon.
Si vous êtes confronté à une situation de plagiat ou de contrefaçon, il est essentiel d’agir rapidement et de manière appropriée pour protéger vos droits et votre travail. Notre cabinet d’avocats spécialisé en droit de la propriété intellectuelle est à votre disposition pour vous accompagner dans toutes les démarches juridiques nécessaires. Que ce soit pour une attaque ou une défense devant les tribunaux, nous mettons notre expertise à votre service pour défendre vos intérêts. N’hésitez pas à nous contacter pour une consultation et découvrez comment nous pouvons vous aider à protéger vos créations.