Salarié se plaignant de harcèlement : quelle protection contre le licenciement ?
Le licenciement d’un salarié qui se plaint de harcèlement moral suscite souvent des interrogations, tant du côté des employeurs que des salariés. Cet article fait le point sur la légalité d’une telle mesure, les protections offertes par le Code du travail, ainsi que les nuances et exceptions issues de la jurisprudence.
Au sommaire
Principe de nullité du licenciement pour plainte de harcèlement
Comme le précise le Code du travail, toute personne se plaignant de harcèlement moral est protégée contre les représailles de l’employeur.
- L’article L1152-1 définit le harcèlement moral comme « des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». Cette définition met en lumière les effets délétères du harcèlement et pose les bases de la protection légale des salariés.
- L’article L1152-2 précise ensuite que « tout salarié ayant subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement moral, ou ayant témoigné de tels agissements, ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte ».
En conséquence, le licenciement prononcé en raison d’une plainte pour harcèlement moral est en principe nul.
L’importance des termes employés dans la plainte
La protection contre le licenciement ne s’applique qu’aux salariés qui qualifient explicitement les faits de « harcèlement moral ». Dans un arrêt du 13 septembre 2017 (Cass. soc., 13 septembre 2017, n° 15-23.045), la Cour de cassation a statué que « le salarié qui relate des faits qualifiés par lui de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi ». Cette précision est cruciale : si les termes employés dans la plainte sont ambigus, la protection pourrait ne pas s’appliquer.
Cependant, un arrêt plus récent a nuancé cette exigence. Dans une décision du 19 avril 2023 (Cass. soc. 19 avril 2023, n°21-21053), la Cour a considéré qu’un licenciement peut être nul même si la plainte du salarié n’utilise pas explicitement les termes « harcèlement moral », dès lors que l’employeur lui-même a reconnu ce terme dans la lettre de licenciement : « Le grief énoncé dans la lettre de licenciement tiré de la relation d’agissements de harcèlement moral par la salariée dont la mauvaise foi n’est pas démontrée emporte à lui seul la nullité de plein droit du licenciement ; il n’y a pas lieu de se prononcer sur les autres faits énoncés dans la lettre de licenciement ».
Il est donc fortement recommandé de suivre des conseils précis lors de la rédaction de votre lettre de dénonciation de harcèlement, afin de garantir que vos droits soient pleinement protégés. Faire appel à un avocat pour relire votre courrier peut être crucial pour éviter toute ambiguïté et renforcer votre position.
L’exception de la mauvaise foi
Le seul cas où le licenciement pour plainte de harcèlement n’est pas nul est celui où la mauvaise foi du salarié est prouvée. En effet, la Cour de cassation admet depuis 2009 (Cass. soc., 10 mars 2009, n° 07-44.092), que la victime ou la personne qui relate des faits qui ne sont pas qualifiés de harcèlement est protégée contre le licenciement lorsque la mauvaise foi n’est pas démontrée. L’employeur doit donc réussir à démontrer que le salarié était conscient de la fausseté des faits dénoncés. À titre d’exemple, si un salarié accuse son employeur de harcèlement en sachant pertinemment que ces allégations sont infondées, le licenciement pourrait être jugé légitime.
Les recours en cas de licenciement après une plainte contre une situation de harcèlement
Lorsqu’un salarié est licencié après avoir déposé une plainte pour harcèlement au sein de son entreprise, il doit contester ce licenciement devant le Conseil de prud’hommes. Si le licenciement est motivé par la plainte, il peut être jugé nul en vertu des articles L1152-2 et L1152-3 du Code du travail.
Dans ce cadre, le salarié peut demander sa réintégration dans l’entreprise ou, si cela n’est pas possible ou souhaité, exiger une indemnisation financière. Cette indemnité est généralement supérieure à celle prévue par le barème Macron, car elle vise à réparer le préjudice causé par un licenciement nul considéré comme plus grave car portant atteinte à un droit fondamental.
En plus de contester la validité du licenciement, le salarié peut demander des dommages et intérêts pour le préjudice moral subi. Cette indemnisation est distincte de celle obtenue pour le licenciement abusif et vise à compenser l’impact psychologique et émotionnel de la situation. La somme accordée dépend de la gravité des faits, de leur impact sur la santé du salarié, et de la manière dont le licenciement a été effectué.
Conclusion
En conclusion, le licenciement d’un salarié qui se plaint de harcèlement moral est généralement nul, sauf si l’employeur parvient à démontrer que cette décision repose sur des motifs étrangers à la plainte. Les termes employés dans la plainte et la bonne foi du salarié sont des éléments déterminants. Il est donc essentiel, pour les salariés comme pour les employeurs, de comprendre les implications légales de telles situations et de solliciter l’aide d’un avocat spécialisé si nécessaire.
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