Agisme en entreprise : comment le combattre ?

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Agisme en entreprise : comment le combattre ?

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Les entreprises sont-elles gérontophobes ? Est-on vraiment « âgé » quand on a plus de 50 ans en entreprise ? Elisabeth Badinter a déclaré dans une interview « la France gérontophobe » – contrairement aux pays nordiques – parce qu’elle connait mal les vieux, leurs facultés et leurs besoins. Il y a d’ailleurs très peu de travaux sur le sujet : « tout se passe comme si la vieillesse était un continent peuplé d’individus exilés d’eux-mêmes, un préambule à la mort ».  Alors que les personnes âgées de 50 ans et plus constituent une part croissante, importante et variée de la population européenne de nouvelles opportunités et de nouveaux défis s’ouvrent à la société. Selon une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publiée en 2019, les discriminations liées à l’âge coûtent aux entreprises environ 6% de leur masse salariale.

Âgisme : quelle définition ? 

Qu’est-ce que l’agisme ? L’agisme est un préjugé ou une discrimination envers les personnes âgées. Il peut prendre la forme de stéréotypes négatifs, de traitement injuste ou de marginalisation des personnes âgées dans la société. L’âgisme apparaît, selon l’Organisation mondiale de la Santé : « […]lorsque l’âge est utilisé pour catégoriser et diviser les gens d’une façon qui entraîne des préjudices, des désavantages et des injustices ». Il peut aussi bien toucher les personnes âgées que les plus jeunes à travers des stéréotypes, des préjugés et des discriminations. En droit du travail, l’agisme est défini comme la discrimination envers les travailleurs âgés dans l’emploi. Cela peut inclure des pratiques telles que le refus d’embaucher ou de promouvoir des personnes âgées, ou encore la mise à la retraite forcée. Il est interdit par la législation en matière d’égalité professionnelle et de protection contre les discriminations.

Quelles sont les causes de l’âgisme ?

Il y a plusieurs causes de l’âgisme, notamment des stéréotypes négatifs, des préjugés inconscients, la pression sociale pour maintenir une apparence de jeunesse, la discrimination systémique et les changements démographiques. Ces causes peuvent se manifester à travers des attitudes et des comportements discriminatoires envers les personnes âgées, et peuvent avoir des conséquences négatives sur leur capacité physique et mentale, leur utilité sociale et leur valeur en tant qu’individus.

Pourquoi l’âgisme en entreprise est un frein à la performance ? 

L’agisme en entreprise est un frein à la performance collective et individuelle. Une étude de l’Organisation internationale du travail (OIT) de 2018 estime que les discriminations liées à l’âge coûtent aux entreprises entre 4% et 12% de leur masse salariale. Au niveau de l’UE, les discriminations liées à l’âge coûtent aux entreprises environ 600 milliards d’euros par an, soit environ 0,5% du PIB de l’UE. Comment expliquer ces chiffres ? Tout d’abord, l’âgisme peut entraver la diversité et l’inclusion, limitant les perspectives et les idées qui peuvent être apportées à l’entreprise. En outre, l’agisme entraine une marginalisation des salariés, ce qui peut entraîner un manque de motivation et d’engagement de la part des employés touchés. Enfin, l’agisme peut également entraver les opportunités de carrière et de développement professionnel pour les employés plus âgés, ce qui peut entraîner une perte de talents et de compétences pour l’entreprise.

Pourquoi les cadres sont souvent concernés par l’âgisme en entreprise ? 

Les cadres sont plus touchés par l’agisme, car ils sont généralement plus âgés que les employés de base et ils ont souvent plus d’expérience professionnelle et de compétences. Les employeurs peuvent considérer que les cadres plus âgés sont moins flexibles, moins adaptables aux changements, et moins enclins à apprendre de nouvelles technologies ou de nouveaux systèmes. Les employeurs peuvent également considérer qu’ils sont plus chers à embaucher ou à conserver en raison de leur salaire et de leurs avantages sociaux plus élevés.

Comment combattre l’agisme en France ? 

Pour combattre l’agisme en France, le gouvernement envisage un Index mais ce n’est suffisant, car il ne devrait concerner que les entreprises de plus de 300 salariés mais en plus la seule contrainte serait la pénalité appliquée aux entreprises coupables de n’avoir pas publiés leurs résultats, que ces derniers soient bons ou mauvais. On peut donc s’attendre à ce que l’emploi de séniors n’évoluent pas favorablement.

Il existe des moyens de combattre l’agisme en France :

  1. Sensibilisation et éducation : Il est important de sensibiliser les français aux stéréotypes négatifs et aux préjugés envers les personnes âgées, ainsi qu’à leurs conséquences. Il est également important de promouvoir une meilleure compréhension de la diversité des personnes âgées et de leurs besoins.
  2. Législation et politiques : Les lois et les politiques qui protègent les personnes âgées contre la discrimination peuvent aider à combattre l’agisme. Par exemple, on pourrait renforcer l’effectivité des sanctions en cas de pratiques discriminatoires en matière d’emploi.
  3. Actions positives : Les employeurs peuvent mettre en place des initiatives positives pour favoriser l’emploi des personnes âgées, comme des programmes de formation, de mentorat et de promotion.
  4. Les actions de la société civile : Les organisations de la société civile peuvent également jouer un rôle important dans la lutte contre l’agisme en sensibilisant les gens aux préjugés envers les personnes âgées et en promouvant des politiques et des pratiques plus inclusives.

En somme, la lutte contre l’âgisme nécessite une combinaison de sensibilisation, de législation et de pratiques positives de la part de différents acteurs.

A quel moment devient-on un « senior » au travail ?

Selon le Code du travail, il est interdit de licencier une personne en raison de son âge. Il n’y a pas de texte officiel pour déterminer qui est considéré comme un « senior » dans le milieu professionnel.

Cependant, certains dispositifs et aides peuvent être appliqués à des tranches d’âges différentes :

  • Par exemple, un CDD senior est ouvert aux personnes de plus de 57 ans alors qu’une aide pour l’embauche d’un senior en contrat de professionnalisation est disponible dès 45 ans.
  • C’est également à 45 ans qu’on fixe l’entretien de mi-carrière, également connu sous le nom d’entretien senior, qui marque le début de la deuxième moitié de la carrière professionnelle d’un salarié.

Pourquoi on devrait arrêter de parler des « seniors » en entreprises ? 

Opposer les seniors aux jeunes en entreprises peut entraîner des discriminations car cela peut créer une division entre les employés en fonction de leur âge, plutôt que de se concentrer sur leurs compétences, leur expérience et leur performance. Il est important de s’assurer que tous les employés soient traités de manière équitable et respectueuse, indépendamment de leur âge. Il est donc important de s’assurer que les employés plus âgés ne soient pas marginalisés ou discriminés en raison de leur âge, et que leur expérience et leur savoir-faire sont valorisés et utilisés de manière appropriée. Il est également important de veiller à ce que les employés de tous les âges aient les mêmes opportunités de développement professionnel et de progression de carrière.

Quelles sont les mesures prises par les autres pays en Europe ? 

Il est important de noter que les lois et les procédures peuvent varier d’un pays à l’autre. En France, lorsqu’un salarié s’estime victime de discrimination au travail, deux actions sont possibles : une action civile devant le Conseil de prud’hommes ou une action pénale. Le contentieux prud’homal a pour objectif d’obtenir l’annulation de la décision prise sur un motif prohibé et de demander la réparation du préjudice subi. L’action en réparation du préjudice se prescrit par 5 ans à compter de la révélation de la discrimination. 

La plupart des pays en Europe on une approche similaire à la France. En Allemagne, la discrimination liée à l’âge est également interdite par la loi et il existe des organes de surveillance pour traiter les plaintes. En Italie, la discrimination liée à l’âge est également interdite par la loi et il existe également des organes spéciaux de surveillance tels que la Commission nationale pour la promotion de l’égalité et les droits contre les discriminations pour traiter les plaintes.

En revanche c’est plus surprenant mais en faisant mes recherches j’ai découvert qu’en Suisse, il n’y a pas d’interdiction légale de la discrimination liée à l’âge. Les actions en justice ne sont possibles que contre l’Etat en tant qu’employeur en vertu du principe d’égalité inscrit dans la Constitution fédérale.

Comment les employés âgés peuvent s’adapter aux nouvelles technologies ?

Selon l’Insee, les salariés âgés sont stigmatisés à travers divers stéréotypes concernant leurs aptitudes et leur attitude envers le travail en particulier pour s’adapter aux nouvelles technologies. En France, elles ont aussi désincité les entreprises à investir dans le capital humain des seniors dont l’âge de départ à la retraite est somme toute « jeune », comparé par exemple à la Suède ou Finlande.Cependant, cela ne signifie pas que les les employés plus âgés ne sont pas en mesure de s’adapter en matière de technologie. En réalité, les salariés plus expérimentés peuvent être tout aussi compétents en matière de technologie que les salariés plus jeunes, surtout si les entreprises investissent dans une formation de qualité. Finalement, les effets négatifs de l’introduction des nouvelles technologies sur l’emploi des seniors pourraient être derrière nous.

En quoi l’âgisme concerne aussi les jeunes ? 

Les discrimination liées à l’âge concernent aussi les jeunes. Cela peut se manifester de différentes manières, comme par exemple : 

  • Sur le marché du travail : les jeunes peuvent avoir des difficultés à accéder à des emplois qualifiés en raison de leur manque d’expérience ou de préjugés liés à leur âge. 
  • Dans les relations sociales : les jeunes peuvent être victimes de préjugés ou de stéréotypes liés à leur âge, comme l’idée qu’ils sont irresponsables ou peu fiables.
  • Au niveau syndical  : les jeunes peuvent être ignorés ou sous-représentés dans les processus de prise de décision, malgré leur droit à voter et à être éligibles, y compris au sein des instances représentatives du personnel
  • Au niveau des aides : le RSA n’est pas accessibles aux personnes de moins de 25 ans. Ce phénomène purement âgiste, puisque c’est bien uniquement l’âge de la personne qui lui interdit l’accès au dispositif.

En conclusion, l’agisme en entreprise est un frein à la performance collective et individuelle. Il peut entraver la diversité et l’inclusion, limitant les perspectives et les idées qui peuvent être apportées à l’entreprise. Il entraine une marginalisation des salariés, ce qui peut entraîner un manque de motivation et d’engagement de la part des employés touchés. Il peut également entraver les opportunités de carrière et de développement professionnel pour les employés plus âgés, ce qui peut entraîner une perte de talents et de compétences pour l’entreprise. Les cadres sont plus touchés par l’agisme, car ils sont généralement plus âgés que les employés de base et ils ont souvent plus d’expérience professionnelle et de compétences. Il est important que les entreprises prennent des mesures pour lutter contre l’agisme et promouvoir l’inclusion des personnes âgées dans leur personnel.

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